Qui sommes-nous ?

Qui sommes-nous ou plutôt qui suis-je. Un passant... C’était il y a une quinzaine d’années rue de Seine à Paris. Pourquoi ai-je tourné la tête ce jour-là ? Le destin... Le pas qui fait suite à tous les autres. Alors un sein. Le maître avait parlé. Modelé. Enfanté en fantasme. Wesselman ? Kacere ? Non, plus puissant, Schlosser.

  • Bonjour, quel est le prix de... (son titre était : « à en pleurer »), et il y avait de quoi.
  • 28 000

Trop cher. Les beaux tableaux sont toujours « trop chers »...

  • Tu ne l’as pas acheté j’espère ! On est déjà dans le rouge.
  • Non, ne t’inquiète pas.

Je ne l’ai pas acheté mais j’ai mal dormi... ce chef-d’œuvre à portée de main... mais pas de portefeuille, avait bouleversé ma nuit ; il devait me rappeler des souvenirs, maman, « et pas que »...

Le lendemain, au téléphone :

  • Bonjour, je suis passé hier, vous me feriez quelque chose sur le tableau de Schlosser ?
  • Non monsieur, et puis il est pratiquement vendu.
  • Ah ! Bon tant pis, merci.

Deuxième nuit sans sommeil, et puis une troisième. Un manque terrible. Comme un être aimé, déjà... Et puis...

  • Allô ? Je vous dérange ? Vous êtes en train d’ouvrir ? Il est vendu ?
  • Bonjour monsieur, excusez-moi de quoi parlez-vous ?
  • Le Schlosser...
  • Non, nous attendons la réponse définitive...
  • Je le prends... J’arrive.... Je le prends... Il est pour moi... il est pour moi j’vous dis, j’arrive.

Qui sommes-nous ou plutôt qui suis-je. Un artaholic qui a été quitté, un jongleur ben oui « à quoi ça sert le cochonnet si t’as pas les boules »... un funambule mais ça fait une vie au fil de l’art...

Alors partageons et caressons l’art qui palpite au rythme du désir de Schlosser et du nôtre.

Encore un souvenir. C’était il y a 20 ans cette fois. Je regardais un olivier millénaire. Là non plus je n’avais pas les moyens d’acheter. Je me suis retourné, j’ai vu quatre autres oliviers et ai entendu un schizophrène dire : « Combien pour les cinq ? ».

Le prix était « trop cher » mais le vendeur a tout dit en disant -je m’en souviendrai toute ma vie- « faites-vous mal monsieur Petitjean ».

Les oliviers poussent aujourd’hui dans un joli terrain..

Devant une Œuvre d’Art, devant Combas, Pasqua, Gudmundur Erró...« faites-vous mal »... Vous cueillerez des olives et serez heureux, à en pleurer...

Claude Petitjean